J'ai été subjuguée par ce livre audio. Depuis un moment je souhaitais lire le roman de Mariana Enriquez tant j'avais vu de critiques élogieuses qui le recommandaient. Sa parution en livre audio a été l'occasion pour moi de me fondre dans ce long récit (27h43 de lecture ou 768 pages en format broché !). Dès le premier chapitre j'ai été happée, et j'avoue que j'aurais pu passer des journées et nuitées entières à ne rien faire d'autre que d'écouter, poursuivre ma lecture. Roman haletant, fantastique comme l'est la vie, le lecteur ne sera libéré qu'à la dernière page, seul moment où le suspense est entièrement levé. Ce livre est un bijou, et la lecture magistrale qui le porte ici est envoûtante, exquise.
L'histoire se déroule en Argentine. Nous suivrons de près les pas d'un père qui tente de sauver son fils d'un destin lourd de souffrances ; puis nous serons au côté du fils qui ne sait ni à quoi il a échappé, ni ce qui l'attend. C'est difficile de résumer l'histoire, sans se perdre dans les mille détails essentiels, et sans rien divulgâcher. Mais disons que l'on comprend assez vite que le père est lié à une grande famille puissante et fortunée qui cherche à s'approprier les secrets de l'immortalité. Pour ce faire, des générations durant ils ont cherché un medium qui puisse les mettre en contact avec le dieu de l'obscurité. Le père, héro du livre, est ce medium qu'ils ont identifié alors qu'il n'avait que cinq ans. Ils l'ont « acheté » à sa famille biologique, l'ont élevé, l'ont formé, et désormais, depuis des décennies, l'utilisent pour leurs rituels sacrés. Notre homme, vidé, épuisé, se sentant esclave, fera tout pour que son fils n'hérite pas de ses dons, et ne devienne pas le futur medium malheureux. Et puis, précisons-le, son épouse, et mère du fils, n'est autre que la fille descendante de cette famille maléfique. Rosario, est lumineuse, très différente de sa parenté.
Les personnages du roman, dont je ne vous ai présenté que quelques uns des principaux protagonistes sont extrêmement bien incarnés, intrigants et très vite attachants. À tour de rôle ils nous dévoilent le déroulement de leur vie passée cependant que le présent se dénoue ou se tord. Une section vers la fin du livre donne voix à une journaliste qui s'intéresse à l'histoire des disparus de l'Argentine et croise les personnages de notre drôle d'équipée.
Si lecteur ne s'en était pas douté jusque-là, il réalise alors que ce dispositif fantastique haletant nous éclaire aussi sur la face sombre de l'Histoire argentine.
Que l'on soit un fervent lecteur du genre fantastique ou non, on trouvera ce roman savoureux et excellent. J'avoue avoir été très admirative face à la patience de l'écrivaine Mariana Enriquez qui a su prendre le temps nécessaire pour porter et déployer cette histoire sans se presser, sans vouloir se précipiter vers la fin. Chaque page, chaque minute de cette lecture est justifiée, participe à la construction de l'ensemble et fait le bonheur du lecteur. Et comme je vous le disais plus avant, Féodor Atkine, Clara Brajtman et Françoise Cadol portent le récit jusque nos oreilles ensorcelées sans faillir .. du premier au dernier mot.
NOTRE PART DE NUIT
(Nuestra parte de noche)
Mariana Enriquez
Traduit de l'espagnol (Argentine) par Anne Plantagenet
Lu par Féodor Atkine, Clara Brajtman et t Françoise Cadol
éd. Audiolib 2023
Cet article a été conçu et rédigé par Yassi Nasseri, fondatrice de Kimamori.