La fleur de l’illusion, de Keigo Higashino

Je ne suis plus une grande lectrice de polars. Autrefois j’en ai lu bon nombre et cela m’a valu le malheur d’apprendre à dénouer les énigmes bien trop tôt dans le récit. Mais j’aime encore savourer un polar de temps à autre, pour deux raisons. D’une part car seul un bon polar sait nous offrir un reportage détaillé et photographique d’un lieu géographique, qu’il s’agisse d’une région, d’un quartier d’une grande ville ou d’une contrée peu connue. Et d’autre part parce que le polar est une étude sociologique menée de main de maître… On nous brosse donc un tableau fort réaliste et instructif cependant que nous sommes happés par l’intrigue haletante !!! Le Japon j’aime, son polar j’épouse donc. Sans compter que l’énigme ici tourne autour d’une fleur qui aurait existé autrefois dans sa teinte jaune et qui semble être réapparue dans cette couleur interdite. Aussi inoffensive que puisse paraître une fleur elle n’en cause pas moins des morts en cascade.

Chiharu ShiotaL’enquête policière est menée en parallèle par un détective, trois jeunes gens en quête de leur devenir et un fonctionnaire. Chacun a ses propres motivations pour mener à bien ses investigations mais au final tous se rencontreront dans un fil de l’histoire si finement tissé que nul n’aurait pu soupçonner que le destin de tous ces êtres fut intrinsèquement relié depuis des générations.

Le récit est mystérieux à souhait et nous révèle, à nous lecteurs occidentaux, les particularités de la société japonaise, les pressions subies par les jeunes qui sont tenus de réussir dans leurs études et leur carrière ou par les individus issus d’une famille éclatée, le divorce étant bien mal acceptée.

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Le poids de la culpabilité n’a d’égal ici que la conscience des responsabilités qui se transmettent de génération en génération. Une société ne peut atteindre la pureté que par la conscience que ses hommes et ses femmes ont de l’importance de la tâche dont ils ont hérité. Et si l’Empereur lui-même a estimé autrefois qu’une certaine teinte d’une certaine fleur devait disparaître à jamais de leurs cultures, toutes les volontés seront unies pour qu’il en soit ainsi !

Joli livre, fluide et bien ficelé.

LA FLEUR DE L’ILLUSION
Keigo Higashino
Traduit du japonais par Sophie Refle
Éditions Actes Sud, 2016

 

 Les installations faites de fils présentées en photo dans cet article sont les oeuvres de Chiharu Shiota.

 

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